Tatouage, Manuel Vázquez Montalbán, Tatuaje

Comme il est mentionné dans la notice d'utilisation, un corps d'homme sans vie flotte négligemment, à quelques mètres d'une plage de sable chaud, dans la zone des trois cents mètres catalane. 
Dès sa découverte, le corps, rongé par le sel et les habitants des mers, est redirigé à renfort de hurlements vers la grève. 


Mais 
puisque je vous dis 
que mon fils n'est pas du genre
 à se tatouer.

- Bon d'accord ! Appelle Carvalho, j'ai une enquête poivrée pour lui et je veux un nom dans la semaine !
- Ok, je le mets dans le texte.

L'enquête est séquentielle. L'idée de base, c'est d'attraper le bout visible de la ficelle et ensuite de tirer dessus et dérouler pour voir s'il y a un autre bout. Classique.
L'immersion dans la Barcelone et l'Amsterdam des années 70 est profitable pour les papilles, la relation à l'humain(e) et le froissement du cerveau. Le profil de Pepe Carvalho, le détective de service, est savoureusement crayonné. Trente-sept ans, fin gourmet, ex-flic, ex-marxiste, consciencieux, jusqu'au-boutiste, amateur de magazines corporels et accessoirement pudique. La mise en bouche est succulente. On approche par petites touches ici et là. Le documentaliste expérimente la distanciation assaisonnée d'un zest de négligence.

On prend l'avion, on fricote avec les peuplades du moyen-nord-europe, on fait travailler la machine à souvenirs, on récolte quelques douceurs, on étudie les comportements sociaux inhérents à la transhumance des peuples.

A Amsterdam on se pâme, 
A la Haye on s'effraye
A Barcelone on transit et on trône

Pepe prend des coups. C'est dans le contrat. 
Il avance tranquillement, s'investit, discute, mange, plonge, s'ébroue, minaude, investigue, affirme, rentre de temps en temps chez lui, à Vallvidrera pour faire un feu de cheminée.
Les femmes qui tournoient dans la cité font ce qu'elles peuvent. Les hommes aussi. Pareil qu'ailleurs. Chacun(e) à sa place. Teresa, la bourgeoise fait un peu d'ombre à Charo, la Dame de bonne compagnie. Rien d'insurmontable.
Les fils s'emmêlent un peu avec ceux de la police mais selon formule consacrée, chacun son métier et les vaches sont bien gardées. 

Pour la gustation le chef suggère : hareng, morue, pain à la tomate, dinde farcie, brie également, dont on ne saura pas s'il est meldois... et bière hollandaise.
On apprend que les gens sympathiques n'ont pas d'exigences envers eux-mêmes... ni même envers les autres; que les plaisirs sont ceux de la mémoire. Une réflexion sur le triangle s'invite (?). Inévitable... Les livres sont brûlés avec méthode. Quichotte succombera dans les premiers.

A méditer : "...sur le palier, dans l'apothéose d'une rosace reproduisant le drapeau catalan, exaltation voulue par une bourgeoisie dans la plénitude de sa maturité et de sa volonté créatrice, au faîte de sa toute puissance. fermez les guillemets.

Alerte info : les services sociaux ont reçu des plaintes suite à des violences  (légères) domestiques de la part dudit Pepe. Il "aurait" répondu que c'était pour les besoins de l'enquête. Ni plus ni moins. A vérifier.
On déplore également quelques comportements violents gratuits zé douteux.

- Tu fais quoi à manger ce soir Blvd? 
- Faut voir !